Il existe de nombreuses méthodes de valorisation d’une entreprise. On considérera dans ce guide les méthodes purement financières basées uniquement sur les états financiers passés et les prévisions ou anticipations futures.
1) Méthode de la valorisation basée sur les actifs
Cette méthode consiste à évaluer une entreprise en estimant la valeur de ses actifs nets. On fait la somme de la valeur des actifs tangibles (biens immobiliers, équipements, etc.) et intangibles (brevets, marques, etc.), puis on soustrait les dettes et autres passifs pour obtenir la valeur nette des actifs.
Cette méthode est la plus simple, voire simpliste. Elle donne tout au plus de bonnes indications sur la valeur de remplacement et la valeur de liquidation. Mais elle a pour inconvénient de ne pas intégrer la rentabilité de l’activité (faible ou importante) et d’être peu prédictive.
2) Méthode de la valorisation par les comparables
Cette méthode consiste à évaluer une entreprise en se basant sur les multiples de valorisation observés pour des entreprises similaires dans le même secteur. On peut utiliser des multiples tels que :
- Le ratio cours/bénéfice (Price/Earnings ratio),
- Le ratio valeur d’entreprise (VE) /Chiffre d’Affaires,
- Le ratio VE / EBITDA.
On applique ensuite ces multiples aux données financières de l’entreprise à valoriser pour obtenir une estimation de sa valeur.
Mais cette méthode n’est pertinente que si l’on peut comparer ces ratios avec d’autres entreprises du même type, du même secteur. Or, dans le cas d’une PME entre 3 et 50 M€ de chiffre d’affaires il est difficile de trouver de l’information fiable. Les bilans disponibles sur les bases de données publiques (Infogreffe, …) ne donnent que peu d’informations et très souvent tronquées notamment si l’entreprise à évaluer est composée de plusieurs entités juridiques.
3) Méthode de la valorisation basée sur les flux de trésorerie actualisés (DCF)
Cette méthode consiste à estimer la valeur d’une entreprise en actualisant les flux de trésorerie futurs attendus. On projette les flux de trésorerie (Cash-Flows) futurs de l’entreprise sur une période donnée, puis on les actualise en utilisant un taux d’actualisation approprié. La somme actualisée des flux de trésorerie futurs représente la valeur de l’entreprise.
Cette méthode est probablement la plus connue et la plus utilisée. Dans le cadre d’une acquisition, elle permet notamment de comparer sa Valeur par rapport à la capacité de remboursement de l’acquéreur et notamment son ratio fonds propres / dettes. Elle a l’avantage d’analyser la performance financière de l’entreprise. Hélas, 2 écueils font qu’elle ne peut pas être utilisée seule :
D’une part elle est fondée uniquement sur une estimation des flux futurs qui par nature sont incertains et un vendeur aura tendance à gonfler ses prévisions surtout s’il n’en n’est pas tenu comptable.
D’autre part, elle ne peut être pertinente que si les flux de cash-flow passés, sur lesquels les flux futurs sont construits, représentent réellement la capacité bénéficiaire normative de l’entreprise. Généralement, dans les PME, les retraitements, positif ou négatif, du cash-flow peuvent être nombreux et fausser ainsi l’analyse.
4) Méthode de la valorisation basée sur les transactions récentes
Cette méthode consiste à utiliser les prix de vente ou les transactions récentes d’entreprises similaires pour estimer la valeur de l’entreprise à valoriser. On se base sur les prix de vente observés dans des transactions comparables pour évaluer l’entreprise.
Cette méthode pourrait être plutôt fiable si l’échantillon analysé est suffisamment large, représentatif et que le prix de cession publié fiable ce qui est rarement le cas pour les PME. Nous connaissons de nombreux cas parmi nos clients où le prix de cession publié dans la presse est soit erroné soit déformé par la structure du deal. Si on considère 2 entreprises ayant la même activité, un chiffre d’affaires à peu près identique et une rentabilité comparable on peut néanmoins avoir des prix de cession très éloignés. Par exemple :
1. L’entreprise A dispose d’une trésorerie surabondante et d’un actif immobilier conséquent inclus dans la transaction.
2. L’entreprise B a régulièrement versé son excédent de trésorerie à ses actionnaires et est simplement locataire.
On comprend bien dès lors l’importance de se plonger à nouveau dans les états financiers pour vérifier la base de comparaison.
D’autres méthodes alternatives et souvent spécifiques à des métiers ont émergé au fil des ans. Il y a quelques années les agences de publicités traditionnelles étaient valoriser sur un multiple de marge brute et permettait rapidement d’approcher une valeur standard. Avec l’évolution du secteur vers le digital cette méthode apparaît désormais désuète.
Plus récemment, les éditeurs de logiciels SAAS nécessitant d’importants investissements humains qui n’apparaissent pas dans l’actif du bilan et « plombent » l’EBITDA ont posé un problème aux évaluateurs. Dès lors des ratios très spécifiques au secteur sont analysés. On prend alors un multiple d’ARR (Annual Recurring Revenue) constitué par les revenus récurrents des abonnements, la croissance de la base de clients et le taux d’attrition, le coût d’acquisition client (CAC)…
Toutes les méthodes basées sur les états financiers de l’entreprise ne sont pertinentes et fiables que si une analyse en profondeur est réalisée et après une discussion avec le dirigeant sur les éléments « non visibles » des comptes.
Alors comment faire pour évaluer mon entreprise ?
1)Prendre les méthodes comptables ci-dessus.
2)Analyser les comptes en profondeur pour retraiter les éléments spécifiques à chacune, structurels d’une part et conjoncturels d’autre part.
Cela vous donnera une valeur financière approximative qui viendra compléter votre analyse de la valeur « business » de l’entreprise (autrement appelée fonds de commerce) qui portera sur tous les éléments qui ne sont pas dans la comptabilité :
- Son marché
- Son business model
- Ses ressources humaines
- Ses clients (taille, typologie, secteur…)
- Ses facteurs internes de croissance autres que la croissance du CA (acquisition clients, rétention clients, turnover, moyenne par client…)
- Les marques, brevets, droits de distribution…
- …
L’analyse de tous ces éléments entre, de notre point de vue, pour au moins la moitié de la valeur de l’entreprise. C’est dire quelle fiabilité nous accordons à la simple étude des bilans comme cela est proposé sur certains site internet.
Et au final ?
Chez TwinL Banque d’affaires, année après année nous avons élaboré et amélioré des matrices d’évaluation qui prennent en compte le maximum d’éléments financiers, incorporels et de marché mais in fine la valeur d’une entreprise dépend uniquement de ce que le marché est prêt à la payer à un instant T.
Dans une cession d’entreprise, ce n’est pas l’expert financier qui détermine la valeur d’une entreprise, pas plus que le chef d’entreprise ne connaît avec précision le chiffre d’affaires et la rentabilité qu’il fera l’année prochaine, car l’expert financier ne peut avoir qu’une idée approximative de l’appétence du marché par rapport à l’entreprise qu’il analyse.
Sur un marché donné, le nombre d’entreprises en recherche d’acquisition vs le nombre d’entreprises en phase de cession fera également varier la valorisation ; d’où l’importance du facteur Temps. La même entreprise aux caractéristiques financières identiques pourra voir sa valorisation varier en l’espace de 3 ans.
La valeur essentielle d’une entreprise dépend aussi et surtout de ce que va en faire l’acquéreur. Entre un acquéreur qui pourra compter sur des synergies majeures, percer un marché stratégique, s’adjoindre des ressources humaines rares et de haut niveau d’expertise dont il ne dispose pas déjà, prendre une position dominante sur ses concurrents, ou même éteindre un propre foyer de pertes…et un acquéreur qui ne bénéficiera d’aucun de ces « plus », le prix de cession peut varier du simple au double voire plus.
C’est ce que nous appelons la Valeur d’Opportunité, le fameux 1+1 = 3++ que tout acquéreur recherche, le Graal de l’acquisition d’entreprise.